Des " doutes sérieux " sur l'usage du MON 810, un maïs transgénique de Monsanto, ont été émis, mercredi 9 janvier, par le sénateur (UMP) Jean-François Le Grand, président de la Haute Autorité provisoire sur les organismes génétiquement modifiés. De tels " doutes " étaient la condition invoquée par Nicolas Sarkozy pour faire jouer une clause de sauvegarde entraînant la suspension du seul OGM cultivé en France. Mais ils ne sont pas mentionnés dans le texte de l'avis, qui se contente d'évoquer des " interrogations ".
Ce décalage a ému plusieurs des membres de la Haute Autorité, qui jugent, par ailleurs, que les critères de l'expertise collective n'ont pas été respectés. Une brèche dans laquelle se sont engouffrés les promoteurs des OGM, qui ont reçu le soutien du président (UMP) de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer.
L'avis, motivé par la découverte de faits scientifiques nouveaux depuis l'autorisation initiale donnée au MON 810 il y a dix ans, perd ainsi de son autorité. La décision de s'en prévaloir pour activer la clause de sauvegarde n'échappera pas au soupçon d'arrière-pensées politiques, alors que des échéances électorales se profilent. Le report de l'examen du projet de loi sur les OGM après les élections municipales ajoute à la confusion.
Les deux camps n'ignorent pas qu'on ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment. Les opposants à ces nouvelles technologies dénoncent tantôt le risque qu'elles feraient peser sur l'environnement et la santé, tantôt la confiscation du vivant par des multinationales. Ils déplorent l'absence d'études sérieuses sur les plantes transgéniques, mais certains arrachent les parcelles où des expérimentations sont menées tout en ignorant celles qui prouvent les éventuels bénéfices des OGM, vis-à-vis de mycotoxines par exemple.
Les promoteurs des biotechnologies font, eux, valoir que la culture en masse des OGM, ailleurs dans le monde, n'a pas conduit aux catastrophes annoncées. Sans préciser que les rapports d'expertise sont le plus souvent fondés sur les données fournies par les semenciers eux-mêmes, qui n'ont pas pour coutume de collaborer avec des laboratoires indépendants.
Le texte de loi, maintes fois reporté, pourrait enfin permettre de clarifier la situation. En définissant des règles du jeu. Sur le type d'expertise, scientifique et " sociétale ", susceptible de rendre compte de l'ensemble des dangers et bénéfices attachés à ces innovations, au cas par cas. Sur le système d'assurances lié à cette forme d'agriculture, afin que la responsabilité des risques qui y sont attachés soit enfin connue. Sur des aspects plus triviaux, comme les distances entre parcelles, qui in fine définiront les conditions de la coexistence - ou non - entre diverses formes d'agriculture.