En quelques jours à peine, ils ont traversé tout le pays. Samedi matin, ils étaient aux portes de la capitale, N'Djamena, et des Français présents sur place et joints par téléphone par les télévisions et radios évoquaient des tirs d'arme lourde aux portes de la ville. A présent, les rebelles se sont emparés de la capitale tchadienne : la chute de N'Djamena a été annoncée samedi en fin de matinée de source militaire. "Toute la ville est entre les mains des rebelles. Il n'y a plus que des combats de nettoyage", a indiqué cette source.
Quant au président Idriss Déby, il est retranché dans le bâtiment de la présidence, près duquel des combats ont été signalés entre forces gouvernementales et rebelles. Le président a tenté pendant une demi-heure, apparemment sans succès, de desserrer l'étau de la rebellion qui l'encercle, en faisant tirer des chars le protégeant. "Idriss Deby est encerclé, il peut se rendre s'il le souhaite", a déclaré un responsable de la rebellion. Selon lui, la rébellion tchadienne envisagerait même d'attaquer le bâtiment présidentiel.
La France condamne l'action des rebelles
Face à la dégradation rapide de la situation, l'Union africaine, qui condamne l'attaque des rebelles, a mandaté le président congolais et le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi pour "trouver une solution négociée". Le président Idriss Deby Itno, chef militaire arrivé au pouvoir par les armes en 1990, avait regagné N'Djamena vendredi lorsque ses forces n'avaient pas réussi à stopper l'avancée des rebelles lors de violents affrontements à une cinquantaine de kilomètres au nord de la capitale. Depuis, il s'est longuement entretenu au téléphone avec Nicolas Sarkozy, qui a ensuite fait le point avec le ministre de la Défense Hervé Morin.
Paris condamne "fermement la tentative de prise du pouvoir par la force" au Tchad "par des groupes armés venus de l'extérieur", appelle à "l'apaisement et à la réconciliation" et apporte son "soutien à la médiation que vient d'engager l'Union Africaine en ce sens". En parallèle, Paris prépare l'évacuation de 700 Français et étrangers, qui sont sous la protection de l'armée française. Ils pourraient être évacués dans samedi après-midi.
La delicate position de l'Eufor
La bataille de N'Djamena coïncide aussi avec le début du déploiement de la force européenne dans l'est du Tchad et en Centrafrique. Le chef de la diplomatie tchadienne a d'ailleurs accusé le Soudan d'être derrière l'offensive des rebelles, avec pour but d'empêcher l'arrivée de l'Eufor et de fermer toute "fenêtre" sur le Darfour.
Les 3700 hommes de la force européenne, dont 2100 Français, sont censés d'ici à fin mai protéger les réfugiés du Darfour ainsi que les déplacés internes tchadiens et centrafricains, soit 450.000 personnes au total. Ce double déploiement militaire français au Tchad, avec des missions totalement différentes, place Paris dans une situation diplomatique délicate, vis à vis des Européens partenaires de l'Eufor, et du régime qui pourrait succéder à celui d'Idriss Deby s'il venait à tomber.
Voir aussi Tchad : les premiers Français évacués dès ce soir ?