Aliments : une source de produits dangereux ?
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16/11/2011
Nos aliments participent à la construction de notre organisme, leur qualité est donc essentielle ! Pesticides, antibiotiques, phtalates ou bisphénol, que consommez-vous réellement et quels sont les risques ?
L’humanité doit faire face à un double problème : nourrir l’ensemble de la population en utilisant des moyens industriels pour faire face à la demande, mais aussi la nourrir de façon qualitative sans la rendre malade. Les produits alimentaires que nous trouvons sur le marché peuvent contenir des substances non naturelles, liées aux pratiques agricoles, à la pollution de l’environnement ou aux emballages alimentaires.
Dans ce dossier, retrouvez les différents types de molécules chimiques que l’on peut rencontrer dans nos aliments, leur origine, leur dangerosité pour l’Homme et l’environnement, et les solutions proposées par les autorités pour protéger les consommateurs.
Aujourd’hui partout et devenus incontournables, les réfrigérateurs, les pesticides ou encore les additifs alimentaires n’ont pourtant pas toujours existé. Retour sur les dates clé de l’industrialisation de l’alimentation.
L’agriculture a bénéficié de grandes avancées depuis son apparition il y a 10.000 ans.
L’alimentation a énormément évolué depuis l’apparition de l’agriculture il y a 10.000 ans, passant d’une agriculture « biologique » à une agriculture intensive au XXe siècle, indissociable de ce que l’on appelle l’industrie agroalimentaire. Petit historique de l’évolution des techniques agricoles et industrielles de ces derniers siècles.
Les dates clé de l'industrialisation de l'alimentation
• 1790 : les prémices de la stérilisation. Fin du XVIIIe siècle, une nouvelle méthode de conservation (autre que le salage, le fumage et le séchage) est inventée par un britannique, à base de chauffage des aliments dans des boîtes hermétiquement closes. Cette méthode appelée stérilisation sera bientôt répandue en Europe et dans le monde entier.
• 1913 : l’électroménager. Début de l’électroménager dans les cuisines. Le premier réfrigérateur est construit, et sera commercialisé pour les particuliers en 1926. Le congélateur arrivera bien plus tard, dans les années 1960, quasiment en même temps que le four à micro-ondes (1959).
Dans les années 1950, le réfrigérateur a déjà sa place chez les particuliers. 1929 : industries agroalimentaires. L
Les grosses entreprises agroalimentaires commencent à voir le jour, notamment Danone.
• 1930 : début des pesticides chimiques. Grâce au développement des armes chimiques de guerre, des molécules chimiques utiles à l’agriculture ont pu être découvertes. C’est le début des pesticides de synthèse (dont le DDT en 1943), des herbicides (le 2,4-D en 1944) et des fongicides (1955).
• 1961 : additifs alimentaires. Les additifs alimentaires sont maintenant recensés et contrôlés par un code alimentaire (Exxx), la Commission du Codex Alimentarius.
• 1990 : scandales alimentaires. Cette décennie voit apparaître des scandales alimentaires, comme la vache folle en 1996, et les dioxines en 1999.
Les additifs alimentaires permettent d’améliorer le goût des produits issus de l’industrie agroalimentaire, leur texture, leur aspect visuel, ou leur durée de conservation. D’où viennent ces molécules aux noms étranges et quels sont leurs effets sur la santé ?
Les colorants alimentaires (qui sont des additifs alimentaires) sont souvent présents dans les bonbons.
Les additifs alimentaires sont des molécules ajoutées aux aliments en petites quantités, et permettent d’ajuster le goût, la couleur, ou de donner au produit une consistance intéressante. Ces molécules sont recensées et contrôlées par une organisation internationale, la Commission du Codex Alimentarius. Ils sont classés en de nombreuses catégories (23), dont voici les principales.
Classement des additifs alimentaires
• Les colorants, qui donnent de la couleur aux aliments (la chlorophylle, E140).
• Les conservateurs, qui donnent une durée de vie plus longue au produit (le dioxyde de carbone ou E290).
• les antioxydants qui empêchent l’oxydation des produits (la vitamine E, E307).
• Les émulsifiants stabilisent l’émulsion et évitent que deux phases se séparent, comme dans les vinaigrettes (la cellulose, E460).
• les épaississants et gélifiants qui renforcent la tenue d’un aliment trop liquide (la gomme xanthane ou E415).
• Les acidifiants qui augmentent l’acidité des aliments (l’acide citrique ou E330).
• Les exhausteurs qui augmentent la perception du goût (la glycine ou E640).
• Les édulcorants qui rendent les aliments sucrés (le sorbitol ou E420).
Ils portent tous un numéro SINxxx ou Exxx (en Europe). Beaucoup d’entre eux sont des molécules naturelles, comme la vitamine C (E300 ou acide ascorbique), ou la lécithine (E322), un émulsifiant issu des œufs ou du soja. Globalement, ces molécules ne présenteraient que peu de risques pour les consommateurs, excepté dans les cas d’allergies ou d’intolérances. Elles sont malgré tout très contrôlées, chacune ayant sa propre fiche signalétique résumant les études scientifiques réalisées sur la molécule, et présentant ses caractéristiques et ses potentiels dangers.
Les additifs alimentaires sont très suivis et contrôlés pour s’assurer de leur non-dangerosité pour les consommateurs. Certains de ces additifs sont-ils malgré tout potentiellement dangereux ? Faisons le point sur l'aspartame, le caramel colorant, les parabènes, le propylène glycol et la saccharine.
L’acide citrique, ou E330, est une molécule retrouvée naturellement dans le citron. Cet additif alimentaire a été accusé à tort de toxicité.
Dans un communiqué daté de 2006, l’Institut de cancérologie Gustave Roussy alertait sur la circulation d’un document mensonger présentant une liste de substances dont près d'une vingtaine qualifiées de « toxiques », « cancérigènes » ou de « suspectes ». « Il est illustré tout particulièrement par le cas de l'additif E330, présenté comme le plus dangereux, alors qu'il s'agit simplement de l'acide citrique qui existe en abondance à l'état naturel dans les agrumes » rappelle l’IGR. « La France est l’un des rares pays à pratiquer le système des listes positives dans ce domaine, c'est-à-dire qu'il est interdit d'employer, dans l'alimentation humaine et animale, tout additif (colorant, conservateur, etc.) qui ne soit pas sur les listes officielles d'autorisation d'emploi. » Selon la législation européenne, les additifs doivent donc être autorisés avant de pouvoir être utilisés dans les aliments. Pour être autorisés, ils doivent être « nécessaires », et surtout sans danger pour les consommateurs.
Pourtant, tous les additifs ne sont pas totalement inoffensifs ou manquent parfois d’études sérieuses et fiables permettant d’assurer leur innocuité. Ainsi, certains sont autorisés dans tous les pays, d’autres non, et si beaucoup sont encore étudiés, certains font l’objet d’études renforcées. Avant fin 2020, l’ensemble des additifs alimentaires autorisés dans l’Union européenne devront faire l’objet d’une réévaluation par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA).
Aspartame (E951)
L’aspartame, un édulcorant très répandu, possède un pouvoir sucrant 200 fois supérieur à celui du sucre (le saccharose). Depuis plus de vingt ans, cette substance inquiète certains scientifiques, une inquiétude qui s’est transmise aux consommateurs.
En 2009, l’EFSA avait conclut qu’il n’existait pas d’élément indiquant un potentiel génotoxique ou cancérigène de l’édulcorant aspartame et qu’il n’était par conséquent pas nécessaire de modifier la dose journalière acceptable (DJA) précédemment établie à 40 milligramme par kilogramme de poids corporel par jour. Après deux études parues en 2010, l’une sur le potentiel carcinogène chez les souris exposées à l’aspartame par le biais de leur alimentation, et une étude épidémiologique examinant l’association entre la consommation de boissons non alcoolisées contenant des édulcorants artificiels et le risque accru d’accouchement prématuré, l’EFSA a réitéré son avis en février 2011 sur la non-révision de la DJA. Pour fin 2011, de nouvelles conclusions de l’EFSA sont attendues.
Caramel colorant (E150c)
La réévaluation par l’EFSA en mars 2011 du colorant caramel E150c a conduit à une diminution de sa dose journalière acceptable à 100 milligrammes par kilogramme de poids corporel par jour, pour prendre en compte un potentiel effet sur le système immunitaire de l’un de ses constituants, le 2-acétyl-4-tétrahydroxibutylimidazole (ou THI).
Parabènes (E216 et E217)
Utilisés comme conservateurs, les parabènes E216 (p-hydroxybenzoate de propyle) et E217 (p-hydroxybenzoate de propyle sodique) ont été retirés de la liste des substances autorisées dans l’Union européenne en 2004 pour cause de réévaluation de leur dose journalière acceptable. Les parabènes sont aussi retirés peu à peu des produits cosmétiques, où ils sont accusés de provoquer des cancers ou de diminuer la fertilité, du fait de leur interaction avec les récepteurs hormonaux œstrogéniques.
Propylène glycol (E1520)
Le propylène glycol (E1520) est utilisé comme émulsifiant, et est considéré par certains comme un additif alimentaire dangereux. Pourtant, des études ont été réalisées et démontrent que les doses létales 50 sont élevées (entre 18 et 24,9 grammes par kilogramme de poids corporel en fonction des animaux testés), que le produit n’est pas cancérigène, pas mutagène, n’affecte pas la fertilité. Il semble toutefois que le chat soit plus sensible que les rongeurs (la dose sans effet toxique étant inférieure à 675 milligrammes par kilogramme de poids corporel, contre 1.700 à 2.000 chez le rat et le chien).
Saccharine (E954)
La saccharine est le plus ancien édulcorant, mais est aujourd’hui moins utilisé que l’aspartame du fait de son arrière goût métallique. Suspectée d’être cancérigène suite à de nombreuses études démontrant son effet sur les rongeurs, elle a longtemps été boudée aux États-Unis. Les doses utilisées dans les produits alimentaires étant beaucoup plus faibles que celles accusées de provoquer des problèmes de santé chez les animaux, la saccharine est aujourd’hui autorisée sans obligation de mise en garde pour la santé.
Pour améliorer les rendements, des pesticides sont utilisés par les agriculteurs ou les éleveurs, évitant ainsi la propagation de micro-organismes ou d’insectes sur leurs produits. Quelles conséquences pour le consommateur ?
Les pesticides sont des produits nocifs pour les nuisibles… mais aussi pour l’Homme.
L'utilisation des pesticides
Substances répandues sur les cultures agricoles, les pesticides ou « produits phytosanitaires » ont pour rôle de lutter contre des organismes nuisibles et de protéger les cultures. C'est un terme très générique qui rassemble les insecticides, les fongicides, les herbicides, les parasiticides.
De 1945 à 1985, la consommation de pesticides a doublé tous les dix ans du fait de leur efficacité et de leur faible prix, pour finalement décroître au cours de dernières années, grâce à un meilleur contrôle de leur utilisation. En 2008, 78.600 tonnes de pesticides ont été utilisées en France, dont 90 % pour l’agriculture.
L’évolution de l’utilisation des pesticides entre 1990 et 2004. © Rapport Pesticides, agriculture et environnement de l’INRA
Selon un rapport de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) daté de juillet 2010, les produits alimentaires européens seraient contaminés par des pesticides. Sur les 70.000 produits testés, dont 200 appartenant à des catégories d’aliments bien différentes, la grande majorité d’entre eux (96,5 %) contenaient ces substances dans les limites autorisées, menant l’EFSA à conclure que l’exposition à long terme des consommateurs ne mettait pas en danger leur santé. En revanche, pour 137 produits, leur consommation en grande quantité induirait un dépassement des doses critiques.
Découvrez, dans les pages suivantes de ce dossier, deux exemples de pesticides couramment utilisés, et dont les résidus peuvent être retrouvés dans nos assiettes :
• le diflubenzuron, retrouvé dans les saumons d’élevage ;
• le bromure de méthyle, répandu notamment sur les fraises.
Retrouvez plus d'informations sur les pesticides sur Futura-Sciences :
• 2011 : Les Français contaminés par les pesticides
• 2010 : Un pesticide favorise l’apparition de Parkinson
• 2010 : Les pesticides, principaux obstacles à la biodiversité
Le diflubenzuron est un pesticide couramment utilisé en agriculture, mais pas seulement. Il est aussi donné à manger aux poissons d’élevage pour lutter contre les poux et même dissout dans l’eau potable pour éviter la multiplication des moustiques vecteurs de maladies. Est-il dangereux ?
Le diflubenzuron est un benzamide (carbone en noir, hydrogène en blanc, oxygène en rouge, azote en bleu, fluor en jaune, chlore en vert). Ce pesticide est largement utilisé.
Le diflubenzuron est un insecticide de la classe des benzamides, qui a pour formule chimique C14H9ClF2N2O2. Il agit comme un inhibiteur de la fabrication de la chitine, la molécule complexe qui forme l’exosquelette des insectes. L’usage du diflubenzuron est autorisé en France pour lutter contre différents insectes, notamment les papillons (carpocapses, bombyx). Est-il aussi toxique pour l’Homme ?
L'effet du diflubenzuron sur la santé humaine
Selon un rapport de l’OMS, le diflubenzuron est considéré comme très peu toxique, la dose létale 50 (la dose causant la mort de 50 % des animaux) chez la souris étant supérieure à 4,5 grammes par kilogramme de poids corporel. Suivant les études réalisées sur les animaux (souris, chien, rat, lapin), aucun indice ne permet de supposer que la substance soit génotoxique ou carcinogénique. Elle n’est pas non plus fœtotoxique ni tératogénique (ne provoque pas de malformations congénitales), et n’aurait pas d’effet sur la reproduction. Les jeunes animaux ne seraient pas plus sensibles que les adultes.
Toutefois, elle provoque un léger effet hématologique. Par un moyen encore inconnu, elle provoque une augmentation de la concentration sanguine en méthémoglobine (un dérivé de l’hémoglobine). La dose journalière acceptable pour l’Homme est de 0,02 milligramme par kilogramme (suivant la NOAEL, ou dose maximale sans effet, estimée à 2 milligrammes par kilogrammes). La détermination d’une dose de toxicité aiguë n’a pas été considérée comme nécessaire par le JMPR (Joint FAO/WHO Meeting on Pesticide Residues).
Le saumon atlantique d’élevage ne contiendrait pas des doses élevées du pesticide diflubenzuron.
Le diflubenzuron dans le saumon d’élevage ?
Le diflubenzuron est administré aux saumons atlantiques d’élevage pour lutter contre les poux (Lepeophteirus salmonis). La dose recommandée (3 milligrammes par kilogramme de poisson par jour pendant 14 jours) est administrée par voie orale, par des granules jetés dans l’eau. Selon certaines études résumées dans un rapport de l’Agence européenne des médicaments (EMEA), l’administration de 333 fois la dose recommandée en 1 fois, ou de 33 fois la dose pendant 21 jours n’aurait pas d’effet sur la santé des poissons.
Si les doses recommandées sont bien appliquées dans les élevages, ainsi que les délais avant la vente des poissons traités (100 jours) pour permettre l’élimination de la molécule de la chair du poisson, il ne reste alors que moins de 50 microgrammes de diflubenzuron par kilogramme de poids total de poisson. Sa consommation ne dépasse alors pas les limites recommandées et reste sans danger pour l’Homme.
Le diflubenzuron dans l’eau ?
Le diflubenzuron étant un insecticide, il peut aussi être utilisé dans les zones à risque pour lutter contre les moustiques vecteurs du paludisme ou de la dengue. Ainsi, l’OMS recommande de le dissoudre dans l’eau potable (à raison de 0,25 gramme par litre) pour tuer les larves qui se développent dans les points d’eau stagnante. Pour un adulte de 60 kilogrammes qui boit 2 litres de cette eau par jour, la dose journalière acceptable n’est pas dépassée. Pour les enfants de moins de 10 kilogrammes qui boivent un litre d’eau, la dose est alors légèrement supérieure à celle recommandée. « Pourtant, dépasser les doses journalières acceptables ne résultent pas forcément en des effets indésirables », explique un rapport de l’OMS (2008). Le diflubenzuron ne serait donc pas si dangereux pour la santé.
Respect des règles européennes
Suite à la diffusion d’un reportage télévisé concernant les élevages de saumon en Norvège et l’utilisation abusive de diflubenzuron qui mène à l’apparition de poissons « monstres », Lisbeth Berg-Hansen, la ministre norvégienne de la Pêche et des affaires côtières, se veut rassurante. Les conditions d’utilisation du pesticide seraient conformes aux règlementations communautaires (respect du règlement 37/2010 de la commission du 22 décembre 2009 relatif aux substances pharmacologiquement actives et à leur classification en ce qui concerne les limites maximales de résidus dans les aliments d’origine animale).
Le bromure de méthyle est un fongicide dangereux aujourd’hui interdit. Il serait pourtant encore utilisé illégalement dans certains pays pour traiter les fruits et les légumes.
Le bromure de méthyle (ou bromométhane) est un gaz incolore et inodore de formule CH3Br, qui peut être produit naturellement par des organismes marins. C’est donc un composé chimique organique halogéné (le brome est un halogène).
Ses propriétés fongicides lui ont valu d’être utilisé comme produit phytosanitaire dans la production fruitière par pulvérisation sur les cultures, mais aussi pour stériliser un grand nombre de matériaux et de sols, et d’éliminer d’autres animaux nuisibles (rats).
L'effet du bromure de méthyle sur la santé humaine
Le bromure de méthyle est très toxique par inhalation (mais peut aussi être absorbé par la peau). Les personnes les plus exposées sont donc celles qui utilisent directement le produit.
Selon sa fiche internationale de sécurité chimique qui résume les risques pour la santé humaine et l’environnement, le bromure de méthyle peut irriter les yeux, la peau et les voies respiratoires. Les symptômes commencent par des vertiges, des maux de tête, des douleurs abdominales, des vomissements, voire des hallucinations et des convulsions. L'inhalation peut causer un œdème pulmonaire et avoir des effets sur le système nerveux central, les reins et les poumons, voire entraîner la mort. Des expositions prolongées ou répétées entraînent des effets sur le système nerveux, les reins, le cœur, le foie et les poumons.
Les études réalisées sur les animaux et l’Homme n’ont pas mené au classement du bromure de méthyle comme cancérigène, malgré l’observation d’une augmentation de tumeurs chez certains animaux exposés. Étant un agent alkylant, il est aussi possible qu’il soit génotoxique mais les doses dangereuses ne sont pas connues.
Les effets des résidus sur les produits alimentaires
Toutefois, une fois répandu sur les aliments pour les protéger contre des parasites ou des animaux, le bromure de méthyle ne reste pas sous cette forme. La majorité du bromure de méthyle se diffuse rapidement dans l’atmosphère, tandis que des résidus d’ions bromures inorganiques peuvent rester sur les produits. Selon des études réalisées, « les résidus de bromure ne posent probablement pas de problème pour la santé humaine si les produits qui les contiennent sont consommés en quantités normales » explique l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).
La partie méthyle peut aussi entraîner des méthylations des protéines ou des acides aminés dans les produits fumigés (la l-méthyl-histidine, la S-méthyl-cystéine, et des composés O-méthylés), mais aucun d’entre eux n’aurait des effets toxiques avérés selon la FAO.
Les fraises, ainsi que des céréales et d’autres fruits et légumes, pouvaient contenir des résidus de bromure de méthyle. Ce produit, désormais interdit, ne devrait plus être retrouvé sur nos aliments.
Son effet sur l’environnement
Le bromure de méthyle était particulièrement répandu sur les céréales, les fruits (notamment les fraises) et les produits alimentaires destinés aux exportations. Dans le passé 70.000 tonnes étaient utilisées chaque année. Après fumigation sur les fruits, le gaz rejoint la haute atmosphère où il contribue à appauvrir la couche d’ozone. Sa durée de vie est assez courte (1,2 an), mais il détruit rapidement les molécules d’ozone.
Les alternatives au bromure de méthyle
Sa dangerosité aussi bien pour l’Homme que pour l’environnement l’ont conduit à être interdit (sauf dérogation) par le protocole de Montréal, un traité signé en 1987 par l’ensemble des gouvernements pour protéger la couche d’ozone. Dès 1999, l’utilisation du bromure de méthyle a été revue à la baisse. Depuis 2005, seules les mesures de quarantaine (pour éliminer des parasites de quarantaine) et avant expédition des produits (moins de 21 jours avant expédition) sont encore appliquées, seulement dans le cas où des produits de substitution ne sont pas disponibles. La France a arrêté définitivement l’utilisation de ce produit. Les dérogations qui ont été accordées pour certains pays ont expiré le 18 mars 2010.
Pour remplacer le bromure de méthyle, trop nocif pour l’environnement, des produits chimiques et non chimiques peuvent être utilisés selon les usages (chloropicrine, dazomet…).
Les antibiotiques sont utilisés en médecine vétérinaire pour soigner les élevages de bovins, de porcs ou d’ovins. Se retrouvent-ils dans nos assiettes et y’a-t-il un risque pour notre santé ?
Utilisation des antibiotiques dans les élevages
Introduits de façon courante au XXe siècle, les antibiotiques renferment de nombreuses familles (pénicillines, aminosides, cyclines, quinolones…), dont les modes d’action sont différents, mais qui ont tous la particularité de tuer ou de limiter la croissance des bactéries pathogènes. Certaines familles sont ainsi plus efficaces que d’autres pour cibler des souches bactériennes, alors que d’autres bactéries seront davantage affectées par une autre famille d’antibiotiques.
Les antibiotiques sont utilisés très fréquemment chez l’Homme, mais aussi chez les animaux d’élevage destinés à produire de la viande, comme les poulets, les bovins, les ovins ou le porc. Les antibiotiques utilisés sont d’ailleurs généralement similaires à ceux administrés aux Hommes. En plus de cet usage purement médical, les antibiotiques ont aussi été utilisés pour favoriser la croissance des animaux (qui gagneraient 3 % de masse) sans que l’on ne connaisse le processus métabolique de cette prise de poids.
La viande peut contenir des bactéries résistantes aux antibiotiques.
Résistance aux antibiotiques, un risque pour la santé humaine
Les antibiotiques ne sont pas directement dangereux pour la santé humaine. Les molécules n’agissent que sur les systèmes bactériens, et sont donc pour la plupart inoffensifs pour les cellules humaines (du moins aux doses auxquelles elles sont utilisées).
En revanche, il existe un risque indirect pour les consommateurs de viande : ce sont les zoonoses. En avril 2010, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) consacrait un dossier sur ces maladies qui se transmettent facilement de l’animal à l’Homme, et leur lien avec l’utilisation des antibiotiques. L’utilisation en masse ou inappropriée des antibiotiques est en effet une cause majeure de l’émergence des résistances de certaines bactéries à certaines classes d’antibiotiques.
Les bactéries résistantes, qui se développent dans les animaux, peuvent être transmises à l’Homme principalement par le biais de la viande. Escherichia coli, Salmonella, Campylobacter, Enterococcus et Staphylococcus aureus, peuvent donc causer des maladies infectieuses gastro-intestinales qui peuvent être difficiles à soigner. Les gènes de résistance portés par les bactéries résistantes peuvent aussi être transmises à d’autres espèces bactériennes et les rendre elles-mêmes résistantes.
D'après l'OMS, au moins 61 % des pathogènes touchant l'Homme sont des zoonoses et les trois quart des maladies ayant émergé ces dix dernières années sont d'origine zoonotiques. Cette résistance progressive des bactéries aux antibiotiques est un vrai problème de santé publique.
es antibiotiques utilisés pour traiter les animaux d’élevage sont un véritable problème de santé publique, car ils provoquent une résistance des bactéries à ces molécules. Existe-il des alternatives concrètes ou du moins des règlementations permettant de limiter les risques ?
L’élevage des bovins nécessite parfois l’utilisation d’antibiotiques pour traiter des maladies bactériennes. Leur utilisation pour augmenter la masse corporelle des animaux n’est pas autorisée.
La mauvaise utilisation des antibiotiques
L’utilisation des antibiotiques à usage vétérinaire a augmenté entre 1999 et 2009 (atteignant 1.067 tonnes), avec un niveau d’exposition des animaux qui s’est élevé de 12,6 %. Malheureusement, les animaux auxquels sont administrés les antibiotiques n’en auraient pas toujours réellement besoin.
Il est donc important de réduire leur utilisation, qui est d’ailleurs contrôlée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation (ANSES), mais aussi de mieux les utiliser. En effet, tous les antibiotiques n’ont pas la même efficacité et certains devraient être réservés aux cas difficiles. Selon l’ANSES, « les céphalosporines de 3e et 4e génération et les fluoroquinolones sont considérées comme particulièrement importantes en médecine humaine car elles constituent l'alternative ou une des seules alternatives pour le traitement de certaines maladies infectieuses chez l'Homme ». D’après les recommandations européennes, ces catégories d’antibiotiques ne devraient être réservées qu’à des traitements curatifs de deuxième intention, c’est-à-dire si le premier traitement ne fonctionne pas ou s’il n’est pas toléré. « La forte augmentation de leur utilisation depuis 1999 [entre 50 et 100 %] est préoccupante » explique l’Anses.
Car malheureusement, les antibiotiques sont difficiles à remplacer. Les nouveaux antibiotiques se font d’ailleurs rares car leur développement est difficile (efficacité antibactérienne mais innocuité pour l’Homme) et les scientifiques manquent de moyens.
L'utilisation d'antibiotiques a augmenté depuis 1999, mais a tendance à diminuer depuis 2007. © Anses
Antibiotiques : quelles réglementations ?
À priori, les vétérinaires et leur prescription d’antibiotiques sont soumis à des règles. Ils ne peuvent prescrire des médicaments qu’aux animaux qui leur sont régulièrement confiés. Toutefois, ils ne sont pas tenus de réaliser une visite systématique de l’élevage avant la prescription de médicaments. Ainsi, une prescription peut être réalisée par la suite sans nouvelle visite des animaux.
L’utilisation systématique d’antibiotiques dans l’alimentation des animaux pour activer leur croissance est totalement interdite en Europe. La Commission européenne travaille à la coordination du suivi des consommations d’antibiotiques en médecine vétérinaire au niveau européen.
Le non-respect de la rédaction de l’ordonnance et l’utilisation d’antibiotiques dans l’alimentation des animaux pour activer leur croissance sont pénalement répréhensibles, comme l’est également le manque de soins des animaux.
Les dioxines apparaissent accidentellement dans les produits alimentaires et sont la cause de contaminations qui ont fait grand bruit. Malgré des contrôles réguliers qui garantissent une qualité sanitaire des produits aux consommateurs, les accidents peuvent difficilement être évités.
Les dioxines sont des composés aromatiques chlorés qui regroupent plus de 200 molécules, classées dans deux grandes catégories :
• les dioxines (ou polychlorodibenzodioxines, PCDD), qui contiennent deux cycles de benzène chlorés reliés par deux ponts oxygène ;
• et les furanes (ou polychlorodibenzofuranes, PCDF), qui contiennent deux cycles de benzène chlorés reliés par un seul pont oxygène.
La plus connue est la 2,3,7,8-tétra-chloro-dibenzo para-dioxine (TCDD), et c’est aussi la plus toxique. Dans l’ensemble, 17 dioxines sont considérées comme dangereuses.
Les dioxines possèdent une grande stabilité thermique et sont peu biodégradables. Elles sont insolubles dans l'eau mais très solubles dans les graisses, ce qui favorise leur accumulation dans les tissus graisseux, où elles peuvent persister très longtemps. Elles s’accumulent tout au long de la chaîne alimentaire, et on les retrouve donc dans les aliments riches en graisse comme les poissons, les crustacés, les produits laitiers et les œufs.
Source des dioxines
Les dioxines ne sont pas intentionnellement produites, mais résultent de la combustion incomplète de molécules organiques. Elles apparaissent au cours de processus industriels thermiques (incendies, incinération) ou chimiques (traitement de la pâte à papier d'origine végétale, impuretés dans certains herbicides), mais aussi par des particuliers (incinération de fond de jardin, combustion du bois…). C’est d’ailleurs cette dernière source qui serait de contamination des œufs de poules élevés en liberté dans certaines fermes.
Le lait peut être contaminé par certains composés de dioxine.
Dangers pour la santé des consommateurs
Les dioxines s’accumulent dans le foie et les tissus adipeux des humains (dont le lait maternel). Leur effet à doses répétées sur la santé n’est pas très bien connu, car les études ont été menées sur l’animal ou sur l’observation de cas de contaminations humaines très fortes. Néanmoins, leur demi-vie (le temps nécessaire à l’élimination de la moitié des molécules) est très longue (7 ans).
D’un point de vue moléculaire, son mode d’action est connu. À l’intérieur de la cellule, la dioxine se lie à un récepteur Ah (Aryl Hydrocarbone), ce qui recrute la protéine Arnt. Ce complexe peut alors pénétrer dans le noyau et activer des séquences spécifiques sur l’ADN ce qui induit une perturbation du fonctionnement de la cellule. Si beaucoup de cellules sont touchées, c’est l’organe dans sa globalité qui dysfonctionne.
L’effet dermatologique est avéré (chloracné, affection cutanée), mais il existerait également des effets tératogènes et cancérigènes. D’autres effets (troubles du système immunitaire, troubles du système endocrinien, altération de la fonction hépatique, troubles de la reproduction, maladies neurologiques) ont été retrouvés dans certaines études discutées.
Retrouvez plus d'informations sur les dioxines sur Futura-Sciences :
• 2006 : Dioxine et cancer : risques et incertitudes
• 2004 : Peur de la dioxine et système d'alerte européen
Les dioxines sont issues de combustions incomplètes et peuvent contaminer certains aliments, comme le poulet ou les œufs. Quelles sont les contaminations célèbres observées au cours de ces dernières décennies, et peut-on, aujourd’hui, les éviter ?
Un incendie peut provoquer une combustion incomplète et la production de dioxines, pouvant contaminer les animaux des environs.
Seveso
La catastrophe de Seveso (Italie) le 10 juillet 1976 a conduit à une émission d’un nuage de dioxine (TCDD) par un réacteur d’une usine chimique, qui a contaminé une région de quinze kilomètres carrés, abritant 37.000 personnes. Des cas de chloracné (touchant 196 personnes) sont apparus quelques jours plus tard. Ceux-ci, et l’ensemble de la population locale, sont encore suivis actuellement pour observer les effets des dioxines sur leur santé. Ils présenteraient une légère augmentation de certains types de cancers ainsi qu’une augmentation des malformations fœtales, mais ces augmentations ne sont pas significatives.
Poulet à la dioxine
Depuis cet accident, l’année 1999 a connu une contamination de volailles et d’œufs en Belgique, c’est l’affaire du « poulet à la dioxine ». La contamination était issue de l'utilisation d'un lot de nourriture pour volailles contenant un taux de dioxine élevé, près de 140 fois supérieur à la limite imposée par l'Organisation mondiale de la santé.
En janvier 2011, une alerte à la dioxine a été lancée dans un couvoir français, dont les œufs étaient heureusement non destinés à la consommation.
Le poulet contaminé à la dioxine n’est pas consommable.
Porc à la dioxine
En 2008, l’un des plus gros rappels d’aliments en relation avec une contamination chimique a suivi la découverte des quantités de dioxine 200 fois plus élevées que la norme dans certains échantillons de viande de porcs en Irlande. Plusieurs tonnes de cette viande ont ainsi été rappelées. Selon les évaluations réalisées dans ce pays, aucun problème pour la santé publique n’a été mis en évidence. Cette contamination aurait eu pour origine la contamination de l’alimentation des animaux.
Comment éviter les contaminations ?
Des mesures ont été prises pour réduire les émissions de dioxines dans l'atmosphère, notamment en contrôlant rigoureusement les processus industriels. Les dioxines peuvent être éliminées en brûlant à haute température les produits contaminés (à plus de 850 °C). Ces mesures ont eu un impact positif en particulier sur les produits terrestres. En revanche, les produits de la mer, en contact avec des réservoirs comme les sédiments, n’ont pas bénéficié d’une amélioration.
Les PCB sont des molécules fabriquées industriellement, polluantes et peu biodégradables. Malgré l’interdiction de leur production et de leur utilisation depuis près de vingt-cinq ans, les PCB sont encore retrouvés dans l’environnement… et dans les aliments.
Utilisation des PCB
La famille des polychlorobiphényls (PCB) renferme 209 molécules différentes. Ce sont des hydrocarbures halogénés (des composés aromatiques chlorés) de haut poids moléculaire, constitués d’un biphényle comportant jusqu’à cinq atomes de chlore sur chaque phényle. Ils n'existent pas à l’état naturel et sont obtenus par des procédés industriels, par chloration du biphényle.
Utilisés dès les années 1930 pour leurs propriétés isolantes (transformateurs électriques) ainsi que leur stabilité chimique et physique (encres, peintures), leur production et leur utilisation ont été interdites en France en 1987 lorsque leur toxicité a été avérée. Du fait de leur stabilité et leur faible capacité à se dégrader, les PCB sont classés parmi les polluants organiques persistants. Avec le temps et des rejets accidentels, ils se sont accumulés dans l’environnement, en particulier dans les sédiments marins ou d’eau douce.
Certains, les plus chlorés, réagissent comme les dioxines, et sont appelés PCB de type dioxine (dioxin-like PCB ou PCB-DL), opposés aux PCB-NDL (non dioxin-like PCB). Douze d’entre eux sont régulièrement dosés car ils sont considérés comme les plus toxiques.
Les PCB et la santé
Ces molécules possèdent la particularité d’être semi-volatiles et hydrophobes. Elles s’accumulent ainsi facilement dans les graisses. On les retrouve dans les tissus adipeux humains, le lait maternel ou les lipides sanguins, et ne sont éliminés qu’après cinq à onze ans par les selles.
La toxicité des PCB est majoritairement liée à leur accumulation dans l'organisme au cours du temps (c’est ce que l’on appelle la charge corporelle). Ainsi, une exposition aiguë (forte mais ponctuelle) à ces molécules au travers d'un aliment très contaminé n'aura que peu d'impact sur la santé. Toutefois, de fortes expositions aux PCB (rejets accidentels, activités professionnelles) peuvent provoquer des effets cutanés (chloracné, pigmentation des ongles et de la peau), oculaires (hypersécrétion) et des troubles hépatiques (altération transitoire de l'activité d'enzymes hépatiques).
Pour des niveaux d'exposition plus faibles mais chroniques, les manifestations les plus préoccupantes liées aux PCB sont des effets neurocomportementaux, de tels effets ont été observés chez le jeune enfant fortement exposé aux PCB pendant la grossesse et l'allaitement. D’autres effets ont été rapportés chez l’adulte : perturbations métaboliques, effets sur la thyroïde.
Les poissons gras peuvent être contaminés par les PCB.
Des PCB dans les poissons
Les poissons gras présents dans les eaux polluées, au sommet de la chaîne alimentaire, peuvent être particulièrement contaminés. Par exemple, certaines régions comme l’estuaire de la Seine, surveillées par le RNO (Réseau national d'observation de la qualité du milieu marin) de l’Ifremer, présentent des concentrations 17 à 22 fois supérieures à la médiane nationale (qui est de 16,4 microgrammes par kilogramme de poids sec).
Contrôle des PCB dans les aliments
Ainsi, l’alimentation est à l’origine de 90 % de notre exposition aux PCB. Toutefois, des teneurs maximales en PCB sont fixées pour beaucoup d’aliments (viandes, poisson, produits laitiers, œufs, graisses, huiles). Si ces seuils sont dépassés, les aliments sont considérés comme impropres à la consommation et leur vente interdite.
Pour s’assurer du maintien des recommandations, la Direction générale de l’alimentation effectue des contrôles annuels. Sur les 1.800 analyses réalisées en 2008, seules quatre non-conformités ont été relevées et ont fait l’objet d’une enquête épidémiologique sur l’origine de la pollution. En 2009, 2.415 analyses ont été réalisées au stade de la commercialisation, et un seul prélèvement s’est avéré non-conforme.
Carte des contaminations aux PCB en France entre 2000 et 2005. Les eaux fluviales du Nord et de l'Est de la France sont particulièrement contaminées. © Agence de l'eau
Plan national d’actions PCB
Depuis 2008, les trois ministères chargés de l’Écologie, de la santé et de l’agriculture conduisent un un plan national d’actions « PCB ». Les différentes mesures ont pour but d’augmenter les contrôles, de réduire les sources de pollution, de fermer des zones de pêches dans des zones trop contaminées. De leur côté, l’ANSES et l’INVS suivent régulièrement le niveau d’exposition de la population, qui serait en constante amélioration.
Retrouvez plus d'informations sur les PCB sur Futura-Sciences :
• 2011 : Les PCB diminueraient la fertilité
• 2011 : Un poisson mutant résiste aux PCB
• 2010 : Dépolluer l’organisme en perdant du poids
• 2010 : Une bonne assiette de produits chimiques !
• 2010 : Un site pour suivre la pollution aux pyralènes
• 2008 : Pollution fluviale au PCB : on sonne l'alerte
• 2006 : Orques : l'espèce animale arctique la plus contaminée !
• 2005 : Quand la rainette grillon accuse le DDT
• 2005 : L'Arctique, la fosse septique de la Terre
• 2005 : De « faux polluants » dans la graisse de baleines ?
• 2004 : Les bébés sont-ils exposés à des neurotoxiques ?
• 2004 : L'ours polaire souffre de la pollution
• 2003 : Le rôle des saumons dans la pollution en Alaska
Les aliments prêts à l’emploi sont généralement commercialisés dans de jolis emballages, souvent très pratiques. Peuvent-ils influencer la qualité des aliments et présenter un danger pour les consommateurs ?
Le pictogramme européen concernant les matériaux destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires.
La réglementation sur les emballages alimentaires
Les emballages alimentaires sont devenus incontournables, et bien qu’ils ne soient pas directement consommés, ils peuvent tout de même être nocifs pour notre santé. C’est pourquoi des législations sont appliquées par l’Union européenne.
Le règlement (CE) 1935/2004 fixe des prescriptions générales pour tous les matériaux destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires. En conditions normales d’utilisation, les matériaux utilisés ne doivent pas céder aux aliments des constituants en quantité susceptible de présenter un danger pour la santé humaine ou d’entraîner une modification inacceptable de la composition des denrées avec ou non une altération des caractères organoleptiques de celles-ci.
Dans les pages suivantes de ce dossier, retrouvez des informations concernant deux molécules très surveillées, souvent contenues dans les emballages :
• les phtalates ;
• le bisphénol A.
Les phtalates, utilisés comme plastifiants, sont retrouvés dans beaucoup de produits du quotidien mais aussi dans des emballages alimentaires. Quels sont les risques pour les consommateurs ?
Les phtalates sont un ensemble de molécules composées d’un noyau benzénique et de deux groupements carboxyliques dont les chaînes alkyles (R) peuvent varier. © Bryan Derksen, Wikimedia, domaine public
Propriétés et utilisation des phtalates
Les phtalates, nés dans les années 1950, sont un groupe de produits chimiques dérivés de l’acide phtalique. Ils sont donc composés d'un noyau benzénique et de deux groupements carboxylates placés en ortho et dont la taille des chaînes alkyles peut varier. Sous forme de liquide visqueux, transparent et incolore, les phtalates sont couramment utilisés comme plastifiants (entre autres pour le PVC) afin de les rendre plus souples, transparents et augmenter leur durabilité.
Les trois millions de tonnes de phtalates produits chaque année sont utilisées dans de nombreux produits d’utilisation courante, notamment des jouets, des appareils médicaux, mais en particulier dans certains emballages alimentaires. Molécules hydrophobes, elles ont une affinité particulière pour les graisses et les alcools lourds.
Du fait de ces propriétés, les phtalates peuvent migrer passivement des emballages alimentaires vers des produits gras comme le fromage. Les aliments contaminés ingérés sont une des sources d’exposition connues, avec une ingestion moyenne de 0,25 milligramme par jour. D’autres sources d’exposition constituent la mise à la bouche des jouets, une hospitalisation dans la mesure où les poches de sang contiennent également des phtalates, ou encore par voie cutanée lors de l’utilisation de cosmétiques.
Les effets des phtalates sur la santé humaine
Le phtalate de bis(2-éthylhexyle) ou DEHP est le phtalate le plus étudié et considéré comme le plus inquiétant. Chez les rats, la toxicité de ces molécules est avérée mais semble très faible, avec des doses létales 50 (qui provoquent la mort de 50 % des animaux) entre 2 et 50 grammes par kilogramme de poids corporel, les effets variant d’un phtalate à un autre.
Chez le rat, les phtalates entraînent des baisses de fertilité et pourraient aussi être cancérigènes. © DR
On retrouve principalement des effets reprotoxiques (de catégorie 2) et tératogènes. Ils provoquent notamment une baisse de la fertilité, une atrophie testiculaire, une réduction du poids du fœtus, une mortalité fœtale et des malformations. Certains phtalates sont également des perturbateurs endocriniens et peuvent provoquer des anomalies du développement sexuel chez le jeune rat mâle exposé in utero. De plus, des effets sur le foie, les reins et le système reproducteur mâle ont été rapportés. Il est un cancérigène probable pour l’animal, mais ses effets chez l’Homme ne sont pas suffisamment étudiés.
La dose journalière recommandée est actuellement de 0,05 milligramme par kilogramme de poids corporel, soit plus élevée que l’ingestion moyenne réellement constatée. Des nausées et des vertiges peuvent survenir en cas d’une ingestion supérieure à 5 grammes.
Les phtalates dans l'environnement
Les phtalates sont bioaccumulables et sont limités par la biodégradation. Dans l’environnement, leur biodégradation se réalise par des micro-organismes aérobies ou anaérobies. Les phtalates de faible masse molaire, plus légers, sont plus facilement biodégradés.
Par quoi les remplacer ?
Les phtalates dans les emballages alimentaires ne sont pas encore interdits, ni par l’Union européenne, ni par la FDA, malgré des propositions dans ce sens. Les produits de substitution, qui restent encore à déterminer, devront avoir les mêmes propriétés de résistance et de flexibilité que les phtalates, notamment en ce qui concerne leur utilisation dans le domaine médical. Mais surtout, ils devront faire l’objet de nouvelles études pour s’assurer de leur innocuité.
Le bisphénol A est l’une des molécules retrouvées dans nos aliments les plus médiatisées. Ce composant de nos plastiques alimentaires est-il réellement dangereux pour notre santé ?
Le bisphénol A est une molécule utilisée dans les plastiques alimentaires. © DR
Créé en 1891, le bisphénol A (ou BPA ou 4,4'-(propan-2-ylidène)diphénol, ou p, p'-isopropylidène bisphénol) est un composé organique aromatique artificiel de formule C15H16O2, constitué de deux phénols liés par un équivalent propane.
Il possède des propriétés similaires à l’œstrogène et fut à ce sujet très étudié dans les années 1930. En effet, il possède la capacité de se fixer (1.000 fois moins efficacement que la molécule naturelle) sur le récepteur alpha des œstrogènes, ce qui aurait pu mener à son utilisation dans le rôle d’œstrogène de synthèse.
Finalement détourné de son rôle premier suite à la découverte de molécules encore plus efficaces, il fut utilisé dès les années 1960 dans la fabrication de plastiques et de résines, où il est associé à d’autres substances chimiques.
Utilisation du bisphénol A dans les emballages plastiques
Ainsi, on retrouve du bisphénol A dans un grand nombre de produits, comme dans les CD, les lunettes de soleil, les tickets de caisse, mais aussi les emballages alimentaires : bouteilles recyclables, biberons (le bisphénol A est interdit dans les biberons en Europe depuis lété 2011), vaisselle (assiettes et tasses). Des résidus de BPA se retrouvent également dans des résines époxy utilisées pour fabriquer des films de protection dans les canettes et certaines boîtes de conserve.
Le BPA peut migrer en petites quantités dans les aliments et les boissons stockées dans des matériaux qui contiennent cette substance, surtout lors du chauffage du plastique (où le polymère qui le compose, sous l'effet de la température, libère une partie du bisphénol A). Ainsi, l’exposition journalière moyenne est estimée à 7 microgrammes de BPA par adulte et par jour, et 90 % des adultes testés ont des traces de bisphénol A dans leurs urines.
Les biberons européens sont désormais sans bisphénol.
Risques pour la santé
Le bisphénol A fait l’objet de beaucoup d’études scientifiques concernant ses effets sur la santé, qui ont souvent donné des résultats contradictoires. Malgré tout, son action sur le récepteur alpha des œstrogènes lui confère une action hormonale possible, et permet de le classer dans la catégorie des perturbateurs endocriniens.
Des études effectuées sur des rats ou des souris ont montré des effets néfastes sur la reproduction, sur les intestins, le cœur, voire sur le développement embryonnaire. Toutefois, il existe des différences majeures entre les espèces de rongeurs et l’Homme sur la façon dont le BPA est assimilé par l’organisme et il n’est donc pas pertinent de transposer les résultats d’une espèce à l’autre. Chez l’Homme, le bisphénol est rapidement éliminé par les urines (en 4 à 5 heures) et ne s’accumule vraisemblablement pas, excepté chez les fœtus et les nourrissons.
Règlementations
Le manque de rigueur de certaines études ne permet pas de conclure avec certitude sur les risques réels de la molécule. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a néanmoins établi une dose journalière tolérable (DJT) de 0,05 milligramme par kilogramme de poids corporel pour le BPA, suivant la dose estimée comme n'ayant aucun effet chez l'animal. Actuellement, le bisphénol A n’est plus autorisé dans les biberons européens, mais reste autorisé dans d’autres emballages alimentaires.
Des alternatives au bisphénol A ?
Le bisphénol A préserve la souplesse du PVC (polychlorure de vinyle) et évite que les plastiques ne se cassent lors des chocs. Les industriels qui ont la volonté de modifier la composition de leurs plastiques doivent donc trouver des molécules aux mêmes propriétés, ou accepter de commercialiser des produits moins résistants.
Ces dernières années, le bisphénol A a beaucoup fait parler de lui, avec ses détracteurs et ses défenseurs. Retour sur le fil d’actualité mouvementé de cette molécule aux effets encore bien mystérieux…
• 2008 : Haro sur les plastiques alimentaires aux USA
• 2008 : Le bisphénol A à nouveau mis en cause
• 2009 : Bisphénol A dans les biberons
• 2009 : Le bisphénol A serait dangereux pour les intestins
• 2010 : Bisphénol A : il serait dangereux pour le cœur
• 2010 : Des champignons pour dévorer le bisphénol A des CD
• 2010 : Bisphénol A : l'Afssa s'inquiète, l'Europe veut agir
• 2010 : Bisphénol A en voie de bannissement des biberons français
• 2010 : Les conclusions de l’Inserm sur le bisphénol A
• 2010 : Le bisphénol A n’inquiète pas l’EFSA
• 2010 : Bisphénol A : deux études inquiètent
• 2011 : Le bisphénol A disparaît de tous les biberons européens
• 2011 : Bisphénol A : un rôle dans le développement embryonnaire
• 2011 : Bisphénol A, phtalates, parabènes… : l’Inserm s'interroge
• 2011 : Bisphénol A in utero et hyperactivité chez les filles
• 2011 : Le bisphénol A favoriserait le stockage des graisses
• 2011 : Le bisphénol A interdit dans les contenants alimentaires